Jean Nouvel : Laisse béton
Source : Le Parisien, Roberto Cristofoli, le 14/12/2010
Les associations dénoncent un bétonnage de l’île Seguin
Le projet de la ville de Boulogne, annoncé jeudi, de construire 337 500m² sur l’île Seguin suscite des polémiques. Les associations environnementales montent au créneau.
L’annonce jeudi, en conseil municipal par le député-maire UMP de Boulogne, de la possible construction de 337 500 m² sur l’île Seguin, soit trois fois plus que ses promesses de campagne électorale, a plongé les associations locales de défense de l’environnement dans une colère froide. « Quand je pense qu’en 2004, alors qu’il s’apprêtait à être candidat, Pierre-Christophe Baguet nous avait soutenus pour que nous obtenions, en attaquant le plan local d’urbanisme du Trapèze, une réduction de 100 000 m² sur ce quartier ».
… révèle Anne-Henri Chombart de Lauwe, président d’Actions Environnement Boulogne-Billancourt (AEBB). « Aujourd’hui, il propose de doubler les 175 000 m² prévus par Jean-Pierre Fourcade alors qu’il disait lors de la campagne des municipales vouloir ramener l’île à 110 000 m² ». « Nous ne sommes pas du tout d’accord avec ça, tonne Anne-Henri Chombart de Lauwe. Nous lui avons rappelé nos inquiétudes à chaque occasion, notamment sur la construction de 140 000 m2 de bureaux. A qui les vendre dans un marché atone et sur une île Seguin où il n’est pas question de construire des parkings souterrains ? Ils seront invendables ».
Le doublement des droits à construire
La crainte d’une sur-densification est aussi vigoureusement dénoncée par Boulogne-Environnement : « Nous allons vers un bétonnage, c’est clair relève Jean-Louis Tourlière, son président. De toute façon, nous avons l’étape incontournable du plan local d’urbanisme qui se présente à nous au printemps. Il y aura une enquête publique pendant laquelle les Boulonnais et leurs associations pourront dire ce qu’ils pensent du projet ». Et Jean-Louis Tourlière de dénoncer d’ores et déjà la hausse spectaculaire de la constructibilité : « C’est purement et simplement un doublement des droits à construire. On densifie pour tenter d’équilibrer financièrement l’opération sans être certain d’y parvenir. Jusqu’où ira-t-on ? » s’interroge-t-il.
Sylvain Canet, président de la Cité des Savoirs du XXIe siècle, se montre aussi très sévère : « Ce qui se profile sérieusement, c’est plus de bureaux, plus de bureaux, plus de bureaux. Quant aux contenants, avec mes amis, nous avons évidemment constaté l’accroissement considérable du volume des constructions : entre 100 et 150 m pour les tours châteaux. » Il révèle aussi une lettre envoyée à Pierre-Christophe Baguet le 20 novembre par huit associations (*) qui écrivaient : « Notre inquiétude se voit confirmée par l’annonce d’une densification de l’île Seguin, l’évolution des finances de la SAEM, la fragilité des perspectives du transport collectif, la sensibilité budgétaire des projets présentés. Elle porte sur les contenants mais aussi sur les contenus culturels, commerciaux, environnementaux ou ludiques, sur les aspects architecturaux mais aussi sur les dispositions juridiques des engagements et autres protocoles d’accord. » Si le projet, que son concepteur Jean Nouvel imagine comme un vaisseau amiral sortant du fleuve continue dans une mer si déchaînée, il risque de connaître le même sort que le « Titanic ».
(*) Les huit associations signataires : Actions Environnement Boulogne-Billancourt AEBB, Boulogne-Environnement, Environnement 92, Intégrer Billancourt, Associations des usagers des transports, Cité des savoirs du XXIe siècle, Val de Seine vert, Issy Ecologie.